Homélie P. Maurice GIRARDIN

Le 14 juillet : Fête Nationale de la France depuis le choix de l’Assemblée nationale, le 6 juillet 1880, en mémoire du 14 juillet 1789, prise de la Bastille et du 14 juillet 1790 !

14 juillet 1790, premier anniversaire de la prise de la Bastille, « se déroule – ainsi que l’écrit Louis Madelin – la grande fête de la Fédération ». Sur la place du Champ de Mars à Paris, le prince – évêque Charles-Maurice de Talleyrand se prépare à célébrer, au milieu d’une foule innombrable, une messe solennelle, en présence du roi Louis XVI. Tiers-Etat, noblesse et clergé, se retrouvent pour célébrer la réconciliation de tout le peuple, selon les principes de la révolution, dont Talleyrand rêve de devenir l’aumônier.. Mais le 12 juillet 1790, la nationalisation de l’Eglise est proclamée. Elle sera suivie de la Constitution civile du clergé dont Talleyrand fut un des premiers jureurs. Le clergé est appelé à jurer fidélité à la Constitution et d’abjurer leur fidélité à l’Eglise de Rome.  La Bastille et la victoire du peuple sur la domination et l’oppression, la Fédération  ont fait place, hélas, à la terreur et aux tragédies qu’elle a entraînées.

Pourtant c’est NOTRE FÊTE NATIONALE, aujourd’hui. Nous lui devons  de l’honorer et de la célébrer, mais en lui donnant signification et contenu, en offrant à notre pays, tout autant qu’à toutes les nations du monde, le message de Paix et d’Espérance de l’Evangile de Jésus Christ. Car il n’est rien de plus triste que de célébrer une fête sans savoir pourquoi, sans connaître son sens. Je pense, entre autre à Noël et à Pâques…

« Domine salvam fac rem publicam   ! Seigneur accorde ton salut à la République », priait-on, tous les dimanches et dans toutes les paroisses de nos deux diocèses concordataires, Strasbourg et Metz.

Qu’en reste-t-il ? Je vous propose de cheminer à la suite de quelques témoins… De nous laisser inspirer par eux pour donner à ce jour ses vraies valeurs.

Saint Benoît de Nursie : 480-547 : Patron de l’Europe, fondateur du monachisme occidental

Saint Pierre, dans son discours chez Corneille présentait ainsi Jésus : « Il est passé partout en faisant le bien ». (Actes 10, 38) C’est ce Jésus que Saint Benoît, fêté le 11 juillet, nous invite à suivre et à imiter. 

Quoi de plus doux, frères très chers, que cette voix du Seigneur qui nous invite ? Voyez comme le Seigneur lui-même, dans sa bonté, nous montre le chemin de la vie.

Ceignons donc nos reins par la foi et la pratique des bonnes œuvres. ; sous la conduite de l’Evangile, avançons dans ses chemins, afin de mériter de voir un jour celui qui nous a appelés dans son royaume, sachons qu’on n’y parvient que si l’on y court par les bonnes actions. »

« Ora et labora ». Priez Dieu et travailler pour l’humanité.

Dans ce même esprit nous rejoignons le témoignage d’un autre saint célébré aujourd’hui même :

Saint Camille de Lellis : 1550-1614 : fondateur des Serviteurs des Malades : Les Camilliens en 1582, que le Père Alphonse Peter a mentionné au début de cette messe :

Comme Saint François d’Assise, quelques siècles avant, il a passé sa jeune vie à se divertir et à guerroyer, avant de découvrir le visage du Christ dans celui des malades, des pestiférés, dans les rues de Rome. Son chroniqueur disait alors de lui :

La charité de Camille était si vive et si largement ouverte qu’il étreignait dans sa bonté et sa bienveillance non seulement les malades et les moribonds, mais  d’une façon général tous les pauvres et les malheureux. Enfin il y avait dans son cœur une si grande tendresse pour les indigents qu’il avait coutume de dire : 

«  Puisque les  pauvres passent inaperçus dans le monde, il faut que les hommes se dépensent à les découvrir et à les faire sortir de terre, pour leur faire du bien et leur montrer de la miséricorde. »

Faire sortir de terre, c’est-à-dire, de l’oubli et de l’indifférence, malades et malheureux, est d’une brûlante actualité. C’est le même appel à la Charité, vertu suprême que nous adresse encore :

Monseigneur Charles RUCH : 1873-1945.  Évêque de Strasbourg : 1919-1945.

Il est exilé en Dordogne, à Périgueux, avec les milliers d’habitants demeurant près des frontières de l’Est. Après la défaite de 1940 et l’annexion insoutenable de l’Alsace et de la Moselle à l’Allemagne nazi, Les allemands lui ont interdit de revenir dans son diocèse, pour sa plus grande souffrance.

Il a retrouvé Strasbourg le 14 décembre 1944, après la libération de la ville.  Sa devise, en français : « Besognons et Dieu besognera » !

Dans sa première lettre pastorale après la Libération, il évoque tout ce que l’Alsace, plus que toute autre région de France a dû subir de la part du régime nazi. Puis il rappellera, peu avant sa mort, dans son testament spirituel, la primauté de l’Amour de Dieu et du prochain.

 « Et vous, mes fils d’Alsace, aimez Dieu de toute votre intelligence, de tout votre cœur, de toutes vos forces. Aimez-vous les uns les autres, comme des frères, plus et mieux que jamais. Je ne peux rien vous souhaiter de plus agréable, de plus utile, de meilleur. Que l’amour de Dieu et la Charité fraternelle assurent à jamais la vertu, la force et le bonheur de la petite et de la grande patrie, de Strasbourg, de Nancy et de la France ! C’est ce que veulent dire ces mots : Je vous bénis ! ».

Monseigneur Charles Ruch décède dans la nuit du 28 au 29 août 1945, peu après avoir désigné et sacré son successeur Monseigneur Jean-Julien Weber.

Alors, à notre tour, besognons, agissons et le Seigneur besognera et agira avec nous et donnons ainsi un sens constructif à notre Fête Nationale.

Comme à bien d’autres endroits, Marie est venue, en ce coin de France, visiter notre monde.

Qu’elle nous aide à  faire de la France, de l’Europe, marquée par une histoire bien mouvementée, de toute la Terre enfin, notre maison, notre village où chacune et chacun doivent trouver leur place, un toit, le pain de chaque jour et l’amitié Fraternelle, dans la Liberté et l’Égalité entre tous et pour tous.

« LA PLUS HAUTE SPIRITUALITÉ EST LE BESOIN DES AUTRES » 

(Parole d’Emmanuel LEVINAS (1906-1995), philosophe français d’origine juive lituanienne et proche de la pensée chrétienne.)

Amen 

M.G.